Les paysagistes inquiets
Comme dans le secteur du BTP, où une étude réalisée début mars par le Syndicat des indépendants montre que 77 % des chefs d’entreprises se disent préoccupés par la poursuite de leur activité, vous nous avez confiés être (logiquement) inquiétés par la fluctuation des prix des matières premières (acier, métaux divers, bois, hydrocarbures...). En effet, les difficultés d’approvisionnement, voire les pénuries de certains produits et matériaux, ont fait grimper les prix depuis plusieurs mois, la tendance s’accélérant chaque semaine. Quid des commandes basées sur des prix qui ont explosé pour ses marchés publics ou privés ? Comment amortir cette hausse ? En augmentant ses prix de vente, avec le risque de voir ses clients aller frapper à la porte des concurrents ? Baisser ses marges, voire ses rémunérations ? Renoncer à un recrutement alors que l’activité bat son plein ? Voici plusieurs pistes d’actions, récoltées via notre enquête Profession paysagiste sur la flambée des prix.
Une majorité d’entreprises touchés par les effets de la crise
Alors que vous êtes tous préoccupés par la flambée des prix des matériaux, près de 90 % d’entre vous affirment déjà en subir les effets. Mais alors comment cela se concrétise-t-il ?
Tout d’abord, c’est le prix des fournitures, « de moins en moins fiables », avec « l’absence de garantie » et une « raréfaction des matériaux associée à une précarité des prix tirés vers le haut », voire une « augmentation journalière des coûts ». Le « prix du bois » est notamment pointé du doigt : « les matériaux d'importation, comme le bois exotique et la pierre naturelle, ont subi la très forte augmentation des coûts de transport maritime. Les délais de disponibilités des matériaux nous obligent à décaler sans cesse nos chantiers. La gestion devient très compliquée ».
Ainsi, parce que la disponibilité en matières premières est de plus en plus limitée pour les fabricants, la conformité des dates de livraison est de plus en plus aléatoire, avec des retards et des délais d'approvisionnement qui s’allongent. Pour vous, entrepreneurs, cela signifie une difficulté d’assurer votre calendrier de travaux établi lors de la signature du projet avec le client.
Un autre effet de cette flambée du prix est « la baisse des demandes des clients ». Enfin, un autre impact notable et dangereux pour nos entreprises est un chiffre d’affaires en baisse et la diminution de « la rentabilité des chantiers, car ils ont été vendus avec un prévisionnel d'achat plus bas, qui n'a pas pu tenir compte de l'inflation des prix ». Ainsi, certains entrepreneurs rognent sur leur marge pour ne pas répercuter l’entièreté de la hausse des prix sur les clients, tandis que d’autres gèlent leurs investissements et réduisent leur salaire.
Quelles mesures d’adaptation ?
Notre enquête révèle que près de la moitié d’entre vous ont mis en place des actions afin de s’adapter à ce contexte compliqué et limiter l’impact de la hausse des prix.
Voici les mesures d’adaptation évoquées :
- raccourcir la validité des devis : le délai moyen actuel est de 15 jours ;
- reporter certains travaux pour avoir plus de visibilité ;
- changer les « CGV (conditions générales de vente) avec possibilité d'appliquer une indexation des prix » ;
- commander les produits dès la signature du devis en demandant aux clients de valider au plus vite le devis (s’ils sont d’accord). « Afin de garantir un tarif à mes clients, je leur demande de m'avancer un acompte afin que je puisse bloquer les matériaux et régler la facture à la commande. De cette façon, j'arrive à gérer ma trésorerie » ;
- actualiser le prix des travaux et des fournitures en fin de chantier, en communicant dès le début « auprès des clients sur les variations possibles » dans le contexte actuel ;
- faire des stocks si vos locaux et votre trésorerie le permettent, par exemple en « stockant un an de produits que l'on sait que l'on vendra. Certains clients acceptent que nous puissions stocker chez eux ». En effet, après avoir passé commande, dans le cas où les travaux sont planifiés plusieurs mois après la validation du devis, certaines entreprises demandent au client de stocker les matériaux chez eux ;
- faire des économies (baisse des salaires, diminution des investissements…).
Et pour la commande publique ?
L’évolution des marchés public et privé est impactée par la flambée des prix. Mais une difficulté supplémentaire s’ajoute pour les marchés publics car ils s’opèrent sur un temps très long : entre la signature du marché, le lancement et la livraison du chantier, il peut s’écouler beaucoup de temps. Les prix initialement donnés dans la réponse à l’appel d’offres peuvent donc considérablement augmenter. Ainsi, pour certaines entreprises, c’est la discussion avec le client et l’acheteur public qui prime, afin de trouver un compromis entre la maîtrise d’ouvrage et l’entreprise.