Pourquoi fertilise-t-on ? Bonne question, car avant de savoir comment et à quelle dose, il faut savoir pourquoi. Pour rappel, la fertilisation, fondamentale, permet :
- de subvenir aux besoins nutritifs des gazons, en compensant ce que le sol ne peut pas fournir ;
- d’optimiser la photosynthèse ;
- d’améliorer l’aspect esthétique, avec des limbes bien verts, conformes aux attentes ;
- de contribuer à une meilleure densité ;
- de résister davantage aux stress (a)biotiques ;
- de régénérer rapidement les tissus ;
- de prendre le dessus sur les herbes indésirables ;
- de limiter le risque d’apparition des maladies, telles que la fusariose froide.
ETAPE N°1 : DETERMINER LE BUDGET CONSACRE A LA FERTILISATION
Comme partout ailleurs, il dépend des moyens propres à chacun, mais aussi des objectifs recherchés. En effet, plus un gazon sportif est joué, plus les exigences de résultats sont élevées, et plus il doit être nourri en conséquence. Mais attention, un gazon mieux nourri ne signifie pas d’apporter plus d’engrais. Tout doit être minutieusement calculé et apporté au bon moment. Pour information, avec un budget inférieur à 1 000 €/ha, il est possible de réaliser un plan de fumure adéquat pour des surfaces agrolimitantes, des fairways de golf... Pour un terrain d’honneur, fortement sollicité, la fourchette moyenne se situe entre 2 000 et 4 000 €/ha (cf. photo).
ETAPE N°2 : DEFINIR LES UNITES ANNUELLES A APPORTER
Chaque macro-élément et chaque oligo-élément est important. Par exemple, il convient d’apporter, en moyenne, 150 à 280 u/ha/an d’azote à libération lente, 50 à 100 u/ha/an de phosphore, 150 à 280 u/ha/an de potasse... Mais tout cela est à affiner suivant :
- les usages (un terrain d’honneur nécessite 200 à 300 u/ha/an d’azote, le double pour un terrain de Ligue 1) ;
- la région (un gazon à Marseille peut consommer jusqu’à 50 unités d’azote en plus par an qu’un gazon situé à Lille !) ;
- les espèces dominantes de graminées (un ray-grass a des besoins annuels d’environ 300 kg/ha, soit deux fois plus qu’une fétuque rouge ou ovine) ;
- la fréquentation (un terrain joué 10h/semaine recevra entre 40 et 50 unités d’azote en plus par qu’un terrain joué moins de 5 h) ;
- la restitution à partir de la matière organique du sol. Sachez qu’un taux compris entre 1 et 3 % de MO équivaut entre 15 et 45 tonnes de MO/ha, soit un potentiel de 15 à 50 unités d’azote libérés/an (principalement au printemps et au début d’automne).
Dans tous les cas, un terrain de sports nécessite au moins 200 u/an d’azote pour assurer la pérennité du gazon. Quel ratio ? Si le sol n’est pas carencé, un équilibre NPK annuel de 3-1-3 est d’usage. En revanche, si une carence en potasse est constatée, la ratio sera de 3-1-4.
ETAPE N°3 : TENIR COMPTE DE L'ANALYSE DE SOL
L’analyse de sol repère les carences et les éventuels excès en éléments nutritifs, ce qui permet d’ajuster davantage le plan de fertilisation. Exemple : en présence d’une belle carence en potassium (0,05 g/kg alors que la teneur souhaitable est de 0,12-0,15 g/kg) et d’un excès de phosphore, 50 unités additionnelles en potasse, apportées pendant 3 ans, permettront de couvrir les besoins du gazon. Si le plan de fertilisation prévu est de 200 -70-200, alors il deviendra 200-30-250 en respectant les ratios.
ETAPE N°4 : FAIRE LE CHOIX D'UN ENGRAIS ADAPTE
Tout d’abord, des critères sont à regarder de près avant de sélectionner tel ou tel engrais :
- conformité avec la réglementation française ;
- granulés complexes vrais (granulés de même composition a contrario des engrais de mélange) ;
- forme des granulés ronds (a contrario des compactés). Pour des terrains de sports, la granulométrie parfaite est de 0,7 à 2,8 mm ;
- taille des granulés et nombres de granulés par gramme d’engrais. Des engrais bas de gamme, ‘anguleux’ et en mélange, contiennent parfois 20 granulés/gramme d’engrais, soit 400 impacts/m² générés lors de l’épandage, alors que les engrais de qualité, bien ronds, contiennent jusqu’à 3 500 granulés/gramme d’engrais, soit 70 000 impacts/m² ;
- indice d’activité (pour les engrais à libération lente) la plus élevée possible sur terrains de sports ;
- efficience de l’azote et formes d’azote à libération lente ;
- solubilité du phosphore et du magnésium dans l’eau ;
- forme de potasse. Il convient de privilégier la forme sulfate (éviter chlorure) ;
- présence ou non de magnésium, d’oligo-éléments, d’additifs agronomiques (types micro-organismes) ;
- teneur en métaux lourds la plus faible possible.
ETAPE N°5 : DETERMINER LE NOMBRE D'APPORTS
L’analyse de sol mesure, entre autres, la valeur de la CEC (Capacité d’Échange Cationique). Si elle s’avère faible, les apports d’engrais devront être fractionnés (5-10) et à faible dose. A l’opposé, une CEC élevée, synonyme d’une grande capacité de stockage, implique de concentrer les apports (3-4) à des doses plus élevées.
ETAPE N°6 : QUAND PROGRAMMER LES APPORTS
Quatre périodes sont décisives : mars/avril, juin/juillet, septembre et novembre/décembre. Pour être plus précis dans les dates, des outils connectés (station météo connectée, sondes de sol...) sont disponibles. Sachez néanmoins que pour positionner le premier apport, il faut attendre que le cumul des températures journalières depuis le 1er janvier soit de 200 °C.
Pour le passage du mois de juin, l’objectif est de dynamiser l’enracinement, d’augmenter la tolérance aux épisodes caniculaires et aux manques d’eau et de renforcer la capacité du gazon à tolérer la pression des pathogènes. Deux éléments sont donc indispensables : la potassium et la silice.
Quant au dernier passage d’engrais de l’année, celui-ci doit être programmé quand la température du sol est inférieure à 10 °C (mais supérieure à 0 °C), soit approximativement entre fin octobre et mi-décembre selon les régions. A noter : une sonde connectée équipée d’un capteur de température de sol sera d’une aide précieuse pour positionner ce dernier apport avec précision.
ETAPE N°7 : QUELLE FORMULATION ? QUELLE QUANTITE ?
La période de l’année détermine l’équilibre de l’engrais. Par exemple, un équilibre azoté s’avère nécessaire lorsqu’on recherche de la pousse végétative au début du printemps et en fin d’été/début d’automne, ou après des opérations mécaniques. Par contre, pour améliorer la résistance du gazon et contrôler la pousse, un engrais équilibré en potasse sera à privilégier en fin de printemps, en été, à l’automne et en début d’hiver.
D’avril à octobre, dès lors que le gazon est en stress (fréquence de jeu, chaleur, sécheresse..), il est également possible d’opter pour des engrais contenant des micro-organismes utiles. Et si des carences sont observées grâce à l’analyse de sol, certaines formulations permettent de corriger des carences avérées.
ETAPE N°8 : COMPLEMENTER LE PLAN DE FERTILISATION AVEC DES BIOSTIMULANTS OU DES ENGRAIS LIQUIDES
Bénéficiant d’une homologation, les biostimulants, qui visent à renforcer les synergies et symbioses tissées entre la plante, le sol et ses espèces symbiotes, possèdent de multiples vertus en favorisant la biodisponibilité et l’efficience de l’assimilation des nutriments, la tolérance aux stress abiotiques (sécheresse, changements brusques de température…) ou encore le maintien des niveaux de croissance en conditions non optimales. Ils peuvent être composés d’extraits d’algues.
Le plan de fumure peut aussi être complété par des solutions liquides, pour combler, par exemple, un déséquilibre en fer ou en magnésium, essentiels pour maintenir les couleurs du gazon.
Enfin, les agents mouillants ne sont également pas à oublier, afin de favoriser l’infiltration de l’eau en profondeur.